Vous trouverez ici des informations sur les crustacés que l’on peut observer dans le Léman.
Vous trouverez d’autres informations sur les crustacés du Léman dans les numéros 60, 113 de notre revue trimestrielle Lémaniques ainsi que dans nos infographies ou dans notre rubrique hebdomadaire Une info en 60 secondes.
Les crustacés sont habituellement associés au milieu marin. Toutefois, certaines espèces vivent dans le Léman et nos cours d’eau, parfois même en très grande quantité.
Leur corps est constitué de plusieurs parties : le céphalon, la tête portant les yeux, les antennes et les appendices pour manger, le thorax et l’abdomen, portant chacun une paire d’appendices ou pattes et le telson, leur queue.
Les crustacés possèdent des branchies qui leur permettent de respirer sous l’eau.
Les crustacés du Léman peuvent être répartis en quatre grands ordres génétiques : les Décapodes (dont les écrevisses), les Amphipodes (dont les Gammares et Corophiidae), les Isopodes (dont les Aselles) et les Mycidacés (dont la Crevette rouge sang).
Les Décapodes, dont les écrevisses, possèdent de grosses pinces qui leur permettent à la fois de se nourrir, mais également de se protéger contre les prédateurs. Elles se déplacent généralement en marchant sur les fonds, mais, lors d’un danger, peuvent également utiliser leurs pinces et leur queue pour se propulser dans l’eau.
Elles se reproduisent de manière sexuée. Les œufs sont gardés par la femelle qui les recueille sur ses pattes auxquelles ils restent fixés jusqu’à l’éclosion.
Omnivores, les écrevisses se nourrissent de petits crustacés, de mollusques, de plantes ou encore de cadavres. Arpentant les fonds lacustres, elles sont à la recherche de proies faciles. Elles peuvent également chasser à l’affût dans des cavités rocheuses. Elles-mêmes sont la proie de certains poissons et oiseaux aquatiques.
Vers 1870, un champignon (Aphanomyces astaci) qui vit dans l’hypoderme et le système nerveux central, a fortement impacté les populations d’écrevisses indigènes présentes en Europe, et notamment dans le Léman. L’écrevisse américaine, Orconectes limosus, a alors été introduite dans plusieurs endroits afin de remplacer les espèces indigènes disparues. Mauvaise idée, porteuses saines de ce champignon, appelé aussi peste de l’écrevisse, elles ont rapidement colonisé les différents milieux et ont continué à propager la maladie.
Les Amphipodes ont la particularité de muer toute leur vie.
Les gammares ont une durée de vie de 1 à 2 ans et peuvent se reproduire jusqu’à 6 fois par an. Les femelles sont beaucoup plus petites que les mâles et on peut souvent les observer en précopula, le mâle chevauchant la femelle.
Ils sont détritivores, c’est-à-dire qu’ils se nourrissent de débris végétaux ou animaux. En mangeant, ils rejettent de petits fragments de végétaux ou animaux qui font le bonheur de la microfaune benthique.
Les gammares indigènes peuvent vivre dans tous les types d’habitats, mais se trouvent très facilement sous les cailloux ou dans les plantes aquatiques. Ils sont également menacés par une espèce exotique en provenance d’Europe de l’Est, le Gammare du Danube. Ce dernier est carnivore et certaines de ses proies sont les gammares indigènes.
Les gammares sont également les proies de nombreux animaux tels que les planaires (vers plats), les sangsues, certains poissons ou oiseaux.
Une autre espèce exotique a récemment colonisé le Léman, il s’agit de Chelicorophium curvispinum. Originaire de la région ponto-caspienne, elle se propage dans toute l’Europe depuis le XXème siècle par les canaux, ou en accrochant ses tubes aux coques de bateaux.
Les Isopodes représentent un grand groupe taxonomique caractérisé par un corps aplati dorso-ventralement. La plupart des espèces sont marines, mais il existe un grand groupe d’espèces terrestres, dont les cloportes, de nombreuses espèces parasites ainsi que des espèces d’eau douce, telles que les Aselles que l’on peut observer dans le Léman.
Les Isopodes muent également toute leur vie mais en deux temps : ils commencent par la moitié postérieure, puis la moitié antérieure. Il est donc possible d’observer des animaux ayant l’arrière du thorax nettement plus large que l’avant, cette apparente anomalie est simplement la preuve que l’animal n’a pas encore accompli la totalité de sa mue.
Durant la période de reproduction, des plaques lamelleuses, ou oostégites, se développent sur la face ventrale de certains segments du thorax des femelles. Ces oostégites délimitent avec la paroi ventrale du corps une poche incubatrice, ou marsupium, dans laquelle se développent les œufs.
Les Aselles pondent généralement deux fois par an et 100 à 200 œufs par ponte.
Pouvant atteindre 1,5 cm, cette espèce est détritivore et est la proie des planaires, sangsues, poissons et oiseaux.
Finalement, les Mysidacés sont un ordre de petits crustacés ressemblant aux crevettes. On les différencie de ces dernières par la présence, chez les femelles, d’un marsupium sous le thorax. Cette poche de couvaison est fermée par les oostégites. C’est à l’intérieur de celle-ci que les œufs sont couvés. Lors de la reproduction, le mâle insère ses pénis dans cette poche et libère ses spermatozoïdes, ce qui va stimuler la libération des œufs par la femelle. Ils y sont fécondés et conservés, le développement des embryons dans la poche à couvain étant directe avec les jeunes qui éclosent des œufs comme des adultes miniatures.
La tête des Mysidacés contient une paire d’yeux pédonculés et deux paires d’antennes. Le thorax est formé de huit segments portant chacun des membres ramifiés, le tout recouvert d’une carapace protectrice. Les deux premiers segments thoraciques portent des maxillipèdes qui servent à filtrer le plancton et les particules organiques en suspension dans l’eau. Les six autres paires d’appendices thoraciques sont des membres qui servent à nager ainsi qu’à faire circuler l’eau vers les maxillipèdes pour se nourrir. Les Mycidacés sont donc des organismes filtreurs, omnivores, qui se nourrissent d’algues, de détritus et de zooplancton.
Ces organismes sont sensibles à la qualité de l’eau et sont donc parfois utilisés comme bioindicateurs.
Les Mysidacés, sont représentés dans le Léman par la récente apparition de la Crevette rouge-sang. Cette espèce invasive est originaire du bassin ponto-caspien. Son invasion a des conséquences importantes sur la composition du zooplancton.
♣ Espèces présentes dans notre carnet de fiches de détermination (vendu dans notre boutique)
L’espèce se reconnaît à la couleur blanchâtre du dessous des pinces. Répandue dans l’ensemble du bassin versant lémanique, elle est la seule espèce indigène du Léman. Malheureusement, elle a disparu du lac en raison de multiples pressions : surpêche, espèces concurrentes et maladies. On la trouve cependant encore dans certaines rivières et des actions sont menées pour les favoriser.
Pouvant mesurer jusqu’à 18 cm, l’Écrevisse signal est la plus grande écrevisse du Léman. Elle est facilement reconnaissable à la tache blanche sur ses grosses pinces rougeâtres. L’Écrevisse signal se rencontre dans les ports et enrochements. Opportuniste, son régime alimentaire est essentiellement carné. Elle est notamment une prédatrice pour les autres espèces d’écrevisses plus petites. Arrivée dans les années 1980 de Californie, elle aurait été introduite pour remplacer les espèces indigènes, atteintes par une maladie dont elle est porteuse saine. ♣
Portant de nombreuses épines acérées, elle est facilement reconnaissable. Des taches brunes sur le dos peuvent également être observées. Détritivore et piscivore, elle apprécie tout particulièrement les petits poissons comme les Vairons et les Épinoches.
Les jeunes se nourrissent également en filtrant le plancton. Comme l’Écrevisse signal, l’Écrevisse américaine a été introduit pour pallier à la diminution des populations indigènes. Cette introduction fut le coup de grâce pour les espèces locales. ♣
Deux espèces de Gammares se rencontrent dans le Léman. Si elles sont très proches morphologiquement, les deux espèces se distinguent plutôt par leurs habitats. Le Gammarus fossarum, élu animal de l’année 2021 par Pro Natura, est plutôt inféodé aux cours d’eau et à des eaux plus fraîches. Au contraire, le Gammarus pulex se rencontre dans les eaux calmes et tempérées. Ces deux espèces ont été fortement impactées par l’arrivée du Gammare du Danube. Ceci a eu pour conséquence un déplacement progressif des Gammares indigènes vers les zones plus profondes (>10 mètres), pas encore colonisées par l’espèce envahissante.
Caractérisé par deux pointes situées en position dorsale sur la fin de son corps, il est également de grande taille (jusqu’à 3 cm pour un mâle adulte). Originaire du Bas-Danube, le Gammare du Danube a rapidement conquis les écosystèmes aquatiques européens. Son arrivée massive dans le Léman date de 2001. Deux ans plus tard, des observations importantes sont faites sur les fonds entre 0 et 5 mètres. Sa progression a sans doute été favorisée par la présence des Moules zébrées et quaggas, deux espèces envahissantes provenant de la même région que le Gammare du Danube. Ces trois espèces ayant co-évolué, des synergies existent dans leur développement.
Les Corophiidae se distinguent facilement des autres Amphiphodes par leurs antennes très développées et modifiées pour former des sortes de pattes. Chelicorophium curvispinum est une espèce d’origine ponto-caspienne, elle est en expansion vers l’Ouest de l’Europe depuis le début du XXIème siècle. Ses déplacements se sont faits par les canaux. La navigation a sans doute accéléré le processus de colonisation. Cette espèce vit dans des tubes qu’elle construit sur des substrats durs, notamment sur les coques des bateaux. Elle peut donc être transportée d’un plan d’eau à un autre.
Les Aselles sont facilement reconnaissables, car leur corps est aplati dorso-ventralement et elles ont deux paires d’antennes dont l’une très longue. On peut observer 8 plaques sur leur corps, dont 7 possèdent des pattes fines. Les Aselles muent également toute leur vie et peuvent atteindre 1,5 cm. Elles sont détritivores et sont la proie notamment des planaires, des sangsues, des poissons et oiseaux.
Asellus aquaticus est d’origine asiatique et entre en compétition avec les espèces indigènes.
Les Mycidacés ressemblent à de petites crevettes avec notamment des yeux pédonculés. Ordre nouvellement arrivé dans le Léman, les Mysidas sont représentés par la Crevette rouge-sang qui tient son nom de sa couleur rouge. Cette petite crevette originaire de la Mer Noire a été recensée pour la première fois en 2007. Depuis, des colonies regroupant de très nombreux individus se sont développées. Pour l’instant, l’impact environnemental de cette nouvelle venue n’est pas encore connu, mais elle pourrait déséquilibrer les populations de zooplancton. ♣
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